Depuis le 21 Février, une stèle de commémoration pour tous les bébés décédés est installée dans le jardin du Crematorium de Nice. Nous sommes très fières du travail accompli et voudrions remercier tous les participants : M. Auguste Vérola du Conseil général des Alpes-Maritimes, la ville de Nice, M. Patrick Moya qui a conçu la stèle, tous les bénévoles de l’association Nos Tout Petits de Nice et les familles qui ont participé à la cérémonie.
Témoignages
« Dans ce projet il y avait deux contraintes : une plaque de marbre à graver et une destination qui demandait moins de légèreté qu’une sculpture habituelle. Pourtant il ne fallait pas que cette stèle ressemble à une pierre tombale. Il fallait évoquer l’enfance avec le nounours qui me semblait l’idéal et les enfants, les bébés dont les dessins vus de loin ont l’air de ne pas avoir eu le temps d’être finis mais s’assemblent quand on s’approche.
Pour un artiste c’est une expérience particulière car contrairement à une sculpture destinée à une exposition il faut savoir s’effacer devant les peines de ceux pour qui l’œuvre est faite. »
Patrick Moya, Auteur de la Stèle, voir son site web
« Pour que les souvenirs trouvent où se poser.
J’ai écrit ce très court texte en mon nom propre ainsi qu’au nom des équipes soignantes dont je fais partie.
Nous avons connu, mais pour un temps si bref, ces enfants qui sont décédés à l’aube de leur vie. Certains nous ont marqués plus que d’autres, mais toujours le souvenir d’eux progressivement s’estompe.
Ce coin de jardin, marqué par cette stèle, est pour le souvenir d’eux tous. Car le souvenir qui s’efface ne se dissout pas dans le temps qui passe. Il s’envole. Ici est le lieu où le souvenir envolé peut venir se poser, au pied de l’ourson, dans cet enclos paisible.
Et quand l’un de nous, soignant, viendra au crématorium pour dire adieu à un parent, un ami, il pourra s’arrêter quelques instants devant cette stèle pour renouer avec ces souvenirs, déposés à ses pieds.
Tous ces enfants ne sont plus ; le souvenir d’eux, ici, reste vivace.Au-delà, une deuxième réflexion. Ce bébé fœtus, bébé garçon, bébé fille, mort au seuil de la vie, nous sommes peu nombreux à l’avoir connu – ses parents, quelques soignants, quelques proches parfois. Comment donner du poids à cette existence qui, pour beaucoup, n’a pas de réalité ?
Seuls des signes matériels, posés par le groupe social, peut venir confirmer aux yeux de tous que oui, ce garçon, cette fille, est passé parmi nous, a fait partie à un moment de la communauté des humains. Ce lieu marqué par cette stèle symbolise cela : ces enfants ont leur place parmi nous, aux côtés de tous ceux que nous avons aimés et qui sont partis.Il est bien que les institutions, et les hommes qui les incarnent, aient compris la nécessité de ces signes.
Au nom des soignants, merci à eux. »
Dr. Christian Dageville, ancien chef du service de réanimation néonatale du CHU de Nice et bénévole chez Nos Tout Petits de Nice. Co-fondateur de l’association Nos Tout Petits de Nice et anciennement vice-président.
« Je m’appelle Susanna Vargiu, et je suis bénévole dans l’association NTPN depuis un an.
Je suis la maman de deux petits garçons, Lorenzo et Alessio, âgés de 5 ans et 2 ans e 1/2 et de Giulia et Melissa, deux petites jumelles, que j’ai perdu a 26 semaines de grossesse.
Comme vous pouvez bien imaginer, c’était une épreuve terrible, et la seule chose qui m’a permis d’avancer, et ne pas m’effondrer, c’était la certitude d’avoir accompli mon rôle de maman jusqu’au bout, et avoir pu les traiter comme des enfants, comme mes enfants, des êtres humains. J’ai pu leur donner un prénom, les déclarer à l’état civil, et organiser une petite cérémonie pour leur dire au-revoir.
Leur petite vie, qui c’est passé pendant 26 semaines dans mon ventre, si éphémère, si fragile, était bien réelle pour moi et l’amour que je prouve encore pour elles est bien réel aussi, et vif.
Quand j’ai perdu mes filles, beaucoup de gens m’ont dit qu’il fallait vite oublier, passer à autre chose, car de toute façon elles n’avaient même pas existé. Au contraire, ce qui m’a permis d’avancer, faire mon deuil, et retrouver la joie de vivre, c’était de NE PAS oublier. C’était de garder les beaux souvenirs, et lasser aller tout le reste, la charge de chagrin, les questions qui de toute façon n’auraient jamais eu de réponse. Le souvenir et la reconnaissance de leurs petites vies m’ont soignée, mais cela m’aurait beaucoup aidé d’avoir un lieu physique pour me recueillir, et envoyer des tendres pensées a mes bébés. Un lieu qui soit beau, et qui manifeste l’amour plus que la tristesse.
Et c’est pour cela que je suis très heureuse, aujourd’hui, de participer à l’inauguration cette stèle de commémoration pour tous les bébés décédés, car c’est un signe de reconnaissance concret et tangible de leur passage sur terre, si court, et pourtant si riche. Et c’est aussi un geste de reconnaissance et de soutien pour les parents et les familles concernées.
Personnellement, je trouve que cette stèle représente parfaitement l’esprit de l’enfance : elle dégage de la joie, de l’amour, des couleurs. Elle est la pour célébrer le souvenir de nos petits et l’amour qu’ils ont apporté dans nos vies: peu importe que nos enfants habitent la terre ou le ciel, nous les aimons tous de la même façon.«
Susanna Vargiu, maman endeuillée et bénévole à l’association Nos Tout Petits de Nice
« Une place pour les bébés décédés
En tant que maman endeuillée, j’aimerais partager une petite histoire offerte par un ami proche lors des funérailles de notre fille il y a bientôt 4 ans. Une histoire un peu adaptée a notre événement aujourd’hui :
‘Regarde, t’as vu ce qui se passe au Crematorium là ?!’ dit le Lapin à la Souris.
‘Cher ami, tu sais que nous sommes tous nés un jour. Certains animaux, sont nés il y a très longtemps et donc ils sont très vieux maintenant. La plupart a eu une vie longue et heureuse : Ils ont fait la fête, ont dansé, mangé plein de gâteaux, hmmm du bon gâteau a la carotte. Toi aussi, t’as aimé, toi aussi t’as rendu heureux d’autres animaux !’ ‘Mais et alors Souris, s’exclame le Lapin, ‘ici là, il s’agit de bébés qui ont vécu a peine et puis ils sont déjà morts ! Ils n’ont pas eu le temps de danser et de manger du gâteau !!!’ ‘Ecoute Lapin’ rétorque la Souris, ‘c’est ce que je te dis, ça, c’est le grand cercle de la vie. T’es ne, tu vis longtemps, puis tu meurs. En même temps, il y a d’autres bébés qui naissent.’ ‘Mais uh,’ demande le Lapin, ‘tous ces bébés morts alors qui ont vécu super peu : c’est hyper injuste !! Ils n’ont pas eu le temps de porter leurs vêtements de fête !!’. ‘Ecoute, écoute, tu vas trop vite. Ces bébés ont vécu, au moins dans le ventre de leur maman. Oui, ils sont morts beaucoup trop tôt, bien de jours et d’années trop tôt. Mais il s’agit quand même d’un cercle, pas le grand cercle de la vie, mais un petit et important cercle : le cercle de l’amour !’
‘Alors, raconte, dis-moi en plus !’ ‘L’amour entre les parents a fait qu’une nouvelle vie est née. Dans ce court laps de temps, les bébés se sont montrés, les parents ont pu les sentir, et là, un lien a été créé. Un contact pour toujours, de l’amour pour toujours. Basé sur cet amour, les parents pourront continuer leur chemin. Les bébés seront toujours dans leurs cœurs : le cercle de l’amour !’
‘Wahoo.. Quelle jolie histoire,’ dit le Lapin, ‘mais comment sais-tu que c’est du vrai tout ca ?’ La Souris lui répond ‘Eh bien, souvent, je me couche dans l’herbe la nuit et je regarde le ciel. ~200 fois par an de notre cote de la région, je vois apparaitre des étoiles que je n’ai jamais vues avant. Chaque nuit ces étoiles veillent a ce que l’amour de leurs parents et de leurs proches se maintient et même s’agrandit.’ Merci a tous ces bébés,’ disent la Souris et le Lapin en même temps.Cercle de l’amour pour lequel le souvenir est nécessaire, le souvenir est nécessaire a la vie.
Ce n’était pas banal de perdre mon enfant, il représentait toute une vie, la sienne et notre vie ensemble. Tout comme moi, la plupart des personnes ne veulent pas oublier, elles demandent de s’en souvenir ensemble et de briser ce tabou si lourd. Ces personnes ayant vécu ce drame de perdre un bébé, n’importe si c’était au premier degré ou au deuxième degré comme proche ou soignant, n’importe l’âge du bébé et n’importe l’année de la perte, ces personnes sont heureuses de voir cette stèle : un lieu, un signe de la place de leurs bébés qu’elles ont accompagnés.
Merci aux responsables qui ont compris cette importance : M Verola, Mme Balduzzi, M Coppolani, M Moya
Merci a tous les bénévolesIl nous reste à faire deux choses ensemble :
• On vous propose une rose blanche que vous pourrez mettre sur la stèle
• Aller dans le jardin ensemble : la stèle a découvrir est a l’Espace 13 ou se trouvent les cendres des bébés décédés.«
Astrid Gunthardt, maman endeuillée et présidente de l’association Nos Tout Petits de Nice